Extrait<br />| I<br />Les vitres ruisselantes d&rsquo;une pluie fine, serr&eacute;e, tenace, ne laissaient p&eacute;n&eacute;trer qu&rsquo;un jour terne dans la grande salle &agrave; manger, toujours un peu obscure. Une p&eacute;nombre enveloppait les dressoirs de bois sombre, le massif buffet garni de vieilles fa&iuml;ences, les tableaux, paysages sign&eacute;s de noms connus, qui ornaient les murs couverts d&rsquo;une tapisserie ancienne. Seule, une petite table, plac&eacute;e tout pr&egrave;s d&rsquo;une des fen&ecirc;tres, voyait arriver &agrave; elle une clart&eacute; &agrave; peu pr&egrave;s suffisante.<br />Du moins, la jeune fille assise l&agrave; s&rsquo;en contentait pour travailler. Sa t&ecirc;te demeurait pench&eacute;e sur le linge qu&rsquo;elle reprisait et l&rsquo;on ne voyait d&rsquo;elle que son buste mince, une nuque blanche, de fins cheveux soyeux, blond argent&eacute;, formant un n&oelig;ud &eacute;pais et partag&eacute;s en bandeaux sur le devant. Les mains qui maniaient l&rsquo;aiguille &eacute;taient petites et bien faites, mais brunies, un peu durcies m&ecirc;me, comme celles d&rsquo;une m&eacute;nag&egrave;re.<br />Le silence, dans cette rue parisienne quelque peu retir&eacute;e, &eacute;tait troubl&eacute; seulement, &agrave; de rares intervalles, par le passage d&rsquo;une voiture ou de pi&eacute;tons dont les pas claquaient sur le sol mouill&eacute;. Dans l&rsquo;appartement lui-m&ecirc;me, rien ne venait le rompre.<br />Mais, soudain, une porte fut ouverte et sur le seuil parut une femme de belle taille, un peu forte, v&ecirc;tue de soie noire. Son &eacute;paisse chevelure fonc&eacute;e, l&eacute;g&egrave;rement grisonnante, formait des bandeaux sur le front haut, d&rsquo;une p&acirc;leur un peu ivoir&eacute;e, comme le visage aux traits fermes, trop accentu&eacute;s, mais d&eacute;notant pour l&rsquo;observateur une dure &eacute;nergie. Les yeux bleus au regard froid, imp&eacute;rieux, n&rsquo;&eacute;taient pas faits pour d&eacute;mentir cette impression qui rendait peu sympathique Mme Norand-Valentina dans le monde des lettres, o&ugrave; elle &eacute;tait consid&eacute;r&eacute;e comme une romanci&egrave;re d&rsquo;un rare, mais amer et &acirc;pre talent.<br />&ndash;&nbsp;Annabel&nbsp;!...|