Extrait<br />|I<br />Les nuages s&rsquo;&eacute;taient un instant &eacute;cart&eacute;s, un vif rayon de soleil d&rsquo;avril frappait le vitrage du bow-window o&ugrave; Myrt&ocirc; reposait, sa t&ecirc;te d&eacute;licate retombant sur le dossier du fauteuil, dans l&rsquo;atmosph&egrave;re ti&egrave;de parfum&eacute;e par les violettes et les muguets pr&eacute;coces qui croissaient dans les caisses, &agrave; l&rsquo;ombre de palmiers et de grandes foug&egrave;res.<br />C&rsquo;&eacute;tait une miniature de petite serre. Tout au plus, entre ces caisses et ces quelques plantes vertes, demeurait-il la place n&eacute;cessaire pour le fauteuil o&ugrave; s&rsquo;&eacute;tait gliss&eacute;e la mince personne de Myrt&ocirc;.<br />Elle reposait, les yeux clos, ses longs cils dor&eacute;s fr&ocirc;lant sa joue au teint satin&eacute; et nacr&eacute;, ses petites mains abandonn&eacute;es sur sa jupe blanche. Ses traits, d&rsquo;une puret&eacute; admirable, &eacute;voquaient le souvenir de ces incomparables statues dues au ciseau des sculpteurs de la Gr&egrave;ce. Cependant, ils &eacute;taient &agrave; peine form&eacute;s encore, car Myrt&ocirc; n&rsquo;avait pas dix-huit ans... Et cette extr&ecirc;me jeunesse rendait plus touchants, plus attendrissants le pli douloureux de la petite bouche au dessin parfait, le cerne bleu&acirc;tre qui entourait les yeux de la jeune fille, et les larmes qui glissaient lentement de ses paupi&egrave;res closes.<br />Sur sa nuque retombait, en une coiffure presque enfantine, une lourde chevelure aux larges ondulations naturelles, une chevelure d&rsquo;un blond chaud, qui avait &agrave; certains instants des colorations presque mauves, et semblait, peu apr&egrave;s, dor&eacute;e et lumineuse. Ses bandeaux encadraient harmonieusement le ravissant visage, doucement &eacute;clair&eacute; par ce gai rayon de soleil per&ccedil;ant entre deux giboul&eacute;es.<br />Myrt&ocirc; demeurait immobile, et cependant elle ne dormait pas. Quand m&ecirc;me sa sollicitude filiale ne l&rsquo;e&ucirc;t pas tenue &eacute;veill&eacute;e, pr&ecirc;te &agrave; courir &agrave; l&rsquo;appel de sa m&egrave;re, la douloureuse angoisse qui la serrait au c&oelig;ur l&rsquo;aurait emp&ecirc;ch&eacute;e de go&ucirc;ter un v&eacute;ritable repos.<br />Bient&ocirc;t, demain peut-&ecirc;tre, elle se trouverait orpheline et seule sur la terre. Aucun parent ne serait l&agrave; pour l&rsquo;aider dans ces terribles moments redout&eacute;s d&rsquo;&acirc;mes plus m&ucirc;res et plus exp&eacute;riment&eacute;es, aucun foyer n&rsquo;existait qui p&ucirc;t l&rsquo;accueillir comme une enfant de plus. Elle avait sa m&egrave;re, et celle-ci partie, elle &eacute;tait seule, sans ressources, car la pension viag&egrave;re dont jouissait madame Elyanni disparaissait avec elle...|