Extrait<br />| I<br />Jean de Malay s&rsquo;en allait d&rsquo;un pas alerte &agrave; travers champs, avec ses chiens sur les talons. C&rsquo;&eacute;tait un beau gar&ccedil;on, nerveux et souple, robuste sous une apparence &eacute;l&eacute;gante. Son visage aux traits fermes, un peu bruni par l&rsquo;air vif, exprimait la joie de vivre, d&rsquo;&ecirc;tre jeune, sain, de conscience tranquille et d&rsquo;&acirc;me enthousiaste. Au passage, les paysans occup&eacute;s &agrave; leurs travaux le saluaient avec une familiarit&eacute; respectueuse.<br />&ndash;&nbsp;Bonjour, monsieur Jean&nbsp;!<br />&ndash;&nbsp;Bonjour, Mousseaume... bonjour, Maellet. Beau temps pour travailler, aujourd&rsquo;hui&nbsp;?<br />&ndash;&nbsp;S&ucirc;r, monsieur Jean&nbsp;! Et le bl&eacute; sera superbe, cette ann&eacute;e.<br />Jean jetait un coup d&rsquo;oeil connaisseur sur les vagues d&rsquo;&eacute;pis qui ondulaient tr&egrave;s loin, jusqu&rsquo;au pied des coteaux couverts de vignes. Il &eacute;tait le plus grand propri&eacute;taire terrien de la contr&eacute;e et s&rsquo;occupait de faire valoir ce domaine transmis jusqu&rsquo;&agrave; lui par ses anc&ecirc;tres. Un r&eacute;gisseur dirigeait sous ses ordres les ouvriers agricoles. Mais Jean avait coutume de tout voir de pr&egrave;s par lui-m&ecirc;me et ne laissait &agrave; personne le soin d&rsquo;encourager moralement les paysans qui vivaient autour de la Varelli&egrave;re.<br />Car il avait une &acirc;me profond&eacute;ment religieuse et tr&egrave;s attach&eacute;e &agrave; tous ses devoirs, ce charmant Jean de Malay dont les yeux d&rsquo;un brun dor&eacute;, gais ou pensifs selon les heures, mais toujours si expressifs et si vivants, eussent fait tourner bien des t&ecirc;tes, s&rsquo;il l&rsquo;e&ucirc;t voulu. Sa m&egrave;re avait cultiv&eacute; avec soin les qualit&eacute;s pr&eacute;cieuses en germe dans cette jeune &acirc;me et, avant de quitter ce monde, l&rsquo;admirable chr&eacute;tienne qu&rsquo;elle &eacute;tait avait pu contempler en lui l&rsquo;&eacute;panouissement de cette &oelig;uvre d&rsquo;&eacute;ducation &agrave; laquelle &eacute;taient consacr&eacute;s tous ses jours avec le souci des pauvres et l&rsquo;accomplissement de ses devoirs de ch&acirc;telaine.<br />&ndash;&nbsp;Marie-toi maintenant, mon cher enfant, lui avait-elle dit tendrement en caressant la t&ecirc;te blonde appuy&eacute;e contre elle, tandis que Jean &eacute;touffait ses sanglots...|