&laquo; <i>C&rsquo;est alors que mourut le matelot Elp&eacute;nor. Seule occasion que j&rsquo;aurai de prononcer son nom, car il ne se distingua jamais, ni par sa valeur, ni par sa prudence. &raquo;&nbsp; </i>Car, &ocirc; Elp&eacute;nor, favoris&eacute; de Zeus, alors que contrefait, cagneux, bancal, de l&rsquo;entrepont tu sors, titubant dans les fum&eacute;es de l&rsquo;herbe des Lotophages, tu n&rsquo;es certes pas le premier &agrave; comprendre les subtiles ruses d&rsquo;Ulysse. L&acirc;che, hypocrite, apr&egrave;s 18 ans, &agrave; l&rsquo;eau encore tu sautes, lorsqu&rsquo;aux rameurs P&eacute;rim&egrave;de commande de nager. Pourtant, par ta langue, si tu en avais deux, ce h&eacute;ro s&rsquo;avouerait vaincu. Et &agrave; l&rsquo;origine des malheurs de tes compagnons git toujours une de tes maladresses.<br />Tes deux coupes de divinit&eacute; ne t&rsquo;emp&ecirc;chent pas, embrum&eacute; de sommeil, de te jeter du haut de la citadelle de Circ&eacute;. (Les fils d&rsquo;Esculape, aujourd&rsquo;hui de ton malheur ont fait un syndrome.) Alors aux enfers, ton ombre, toujours fid&egrave;le, vient compliquer encore la mission de cet Ulysse qui fut ton chef. Aux v&oelig;ux de Circ&eacute; comme &agrave; l&rsquo;imprudente oraison fun&egrave;bre du fils de La&euml;rte, de Zeus tu re&ccedil;ois, d&rsquo;une nouvelle vie, le pr&eacute;sent. Mais n&rsquo;est-ce pas pour encombrer Ulysse d&rsquo;avantage et, dans l&rsquo;Odyss&eacute;e, le remplacer ? Et mourir encore et encore ?<br />Dans ces quatre textes r&eacute;dig&eacute;s successivement en 1908, 1912, 1919 et 1924, Elp&eacute;nor, le &laquo; Charlot de l&rsquo;Odyss&eacute;e &raquo;, va peu &agrave; peu prendre toute la place et faire glisser l&rsquo;&eacute;pop&eacute;e vers le burlesque. Canular alors ? Oui par la distance ironique de Giraudoux face au langage savant, la versification grecque et le &laquo; gorillage &raquo; du langage &eacute;pique.